Rétablissons les faits
Vers une meilleure compréhension des décisions disciplinaires
Chers collègues,
Je me dois de vous adresser ce message à la suite de la publication récente d’un article dans Profession Santé portant sur deux décisions disciplinaires[1] rendues dernièrement. Je comprends les réactions qu’a suscitées cet article et je considère qu’il est nécessaire de clarifier la situation pour favoriser une meilleure compréhension et apaiser les tensions. Les décisions disciplinaires sont toujours complexes et leur interprétation peut parfois porter à confusion sans les explications appropriées. C’est exactement ce qui s’est produit dans ce cas-ci.
Les faits
Les deux décisions disciplinaires dont il est question ici nous rappellent essentiellement l’importance de consigner au dossier les interventions qui sont effectuées pour favoriser l’observance thérapeutique, faisant partie de l’activité de surveillance de la thérapie. Dans ces cas, aucun plan d’intervention ou de note au dossier ne permettait de vérifier si un suivi avait été fait.
Cette distinction est fondamentale et je tiens à la rappeler : en tant que pharmacien(ne)s, nous sommes lié(e)s à une obligation de moyens et non de résultats pour cette activité. Notre responsabilité professionnelle porte sur la qualité des soins que nous prodiguons, sur l’accompagnement offert et sur la documentation de nos interventions, mais les choix ultimes de nos patient(e)s leur appartiennent.
L’importance de la documentation
La notion de documentation demeure un pilier de notre pratique professionnelle. En effet, la note au dossier est fondamentale puisque si une intervention n’est pas notée, elle pourrait être considérée comme non réalisée. Cette règle n’est pas là pour nous compliquer la vie, mais bien pour protéger nos patient(e)s, notre pratique et assurer la continuité des soins.
Une approche constructive
Depuis le début de ma carrière, j’ai toujours pris le temps de lire les décisions disciplinaires. Je l’avoue, elles m’ont parfois causé des inquiétudes, mais je reconnais aussi qu’elles ont contribué à enrichir et à améliorer ma pratique au fil des ans.
Ce qu’il faut retenir de ces décisions, ce n’est ni la peur de pratiquer, ni la colère née de l’incompréhension. C’est plutôt l’occasion de réfléchir à nos pratiques et de les adapter, non pas dans une logique défensive face à d’éventuelles enquêtes, mais dans une démarche d’amélioration continue au service des besoins réels de nos patient(e)s.
Je tiens également à rappeler un principe fondamental de notre profession : en tant que pharmacien(ne)s, nous sommes collectivement responsables du bien-être de nos patient(e)s. Lorsqu’un collègue signale une situation préoccupante, ce geste n’est pas posé pour attaquer d’autres pharmacien(ne)s, mais bien dans le respect de cette responsabilité collective envers la sécurité des patient(e)s. C’est cette solidarité professionnelle qui renforce la confiance du public envers notre profession.
Notre engagement envers vous
Les pharmaciens et pharmaciennes qui travaillent à la Direction des enquêtes n’ont pas un travail aisé, mais ils le réalisent toujours en exerçant un jugement nuancé, soupesant constamment les exigences de protection du public face aux réalités de la pratique professionnelle. Ils accomplissent cette tâche ardue avec la rigueur qu’impose leur rôle.
Ceci étant dit, nous reconnaissons le besoin de mieux communiquer les décisions disciplinaires. Nous devons déterminer la meilleure façon de le faire, mais nous nous fixons pour objectif de vous fournir davantage d’explications sur les enseignements à retenir des décisions, afin de favoriser une meilleure compréhension globale et ainsi améliorer collectivement nos pratiques.
Votre dévouement envers vos patient(e)s et votre profession est indéniable. Continuons ensemble à faire évoluer notre pratique dans le respect de nos valeurs professionnelles et au bénéfice de la santé publique.
Jean-François Desgagné
Président de l’Ordre des pharmaciens du Québec
[1] Pour consulter les décisions : Pharmaciens (Ordre professionnel des) c. Khaouam, 2025 (CanLII) et Pharmaciens (Ordre professionnel des) c. Saour, 2025 (CanLII)